Groupe symétrique. Chapitre II. 1 Définitions et généralités
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- Aurore Gascon
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1 Chapitre II Groupe symétrique 1 Définitions et généralités Définition. Soient n et X l ensemble 1,..., n. On appelle permutation de X toute application bijective f : X X. On note S n l ensemble des permutations de X. Proposition 14. Muni de la loi de composition des applications, S n est un groupe. Définition. S n, est appelé le groupe symétrique ou groupe des permutations de X. Démonstration. Soient f, g S n. Alors la composée g f est une application de X dans lui-même, et est une bijection en tant que composée de deux applications bijectives. Donc g f est une permutation de X. Par conséquent, la loi S n S n S n, f, g f g est une loi de composition interne dans S n. L élément neutre de S n est l application identité Id X : X X (Id X x x pour tout x X). En effet, pour tout f S n et pour tout x X, on a f Id X x f x Id X f x, d où f Id X Id X f. Enfin, comme f est bijective, son application inverse existe, c est aussi une permutation de X. Notation. Si S n, on peut représenter par un tableau : 1 2 n. L élément neutre Id est représenté par, et l inverse n de par. Bien qu il s agit de la composition, on parle souvent du «produit de par», et l on écrit aussi au lieu de, qui signifie «effectuer d abord la permutation, puis la permutation». Proposition 15. Soit n. Alors S n, est un groupe fini d ordre n!. Si n 3, S n est un groupe non commutatif. Démonstration. Une permutation de S n est entièrement déterminée par les images de 1,..., n, qui sont des éléments distincts de 1,..., n. Pour compter le nombre d éléments de S n, observons que pour l image de 1, il y a n choix, pour l image de 2, il y a n 1 choix (car 2 1 ), pour l image de 3, il y a n 2 choix (car 3 1, 2 ), et ainsi de suite, enfin pour l image de n, il y a 1 choix (car n 1,..., n 1 ). Donc au total, il y a n! n n permutations de 1,..., n, c est l ordre du groupe S n. Soit n 3. Pour montrer que S n est non commutatif, il suffit d exhiber deux éléments, S n, tels que. Prenons par exemple : n et n. 12
2 CHAPITRE II. GROUPE SYMÉTRIQUE 13 Alors : n n. 2 Cycles Définition. Si 1 k n, on appelle cycle de longueur k ou k-cycle, une permutation de S n telle que i 1 i 2, i 2 i 3,..., i k 1 i k, i k i 1, et i k 1 i k 1, i k 2 i k 2,..., i n i n, où i 1, i 2,..., i n sont les éléments distincts de l ensemble 1,..., n, c est-à-dire de la forme i 1 i 2 i k 1 i k i k 1 i n i 2 i 3 i k i 1 i k 1 i n. Il y a n k éléments fixes i k 1,..., i n. On notera ce k-cycle plus simplement par i 1, i 2,..., i k. (a) Dans S 6, la permutation est un 3 cycle. On le note 2, 5, 3 (ou 5, 3, 2 ou 3, 2, 5 ). (b) Dans S 6, la permutation n est pas un cycle. (c) Dans S 8 le 5 cycle 1, 8, 5, 3, 7 correspond à la permutation Remarques. (a) Un k cycle de S n vérifie k Id, et k est le plus petit entier positif vérifiant cette équation. Ainsi, un k cycle est un élément du groupe S n d ordre k. (b) L unique 1 cycle est l identité. (c) L inverse du k cycle i 1, i 2,..., i k est i k, i k 1,..., i 1 Définitions. (a) Un 2 cycle est appelé transposition : elle échange deux éléments et laisse fixe tous les autres. Une transposition est donc de la forme 1 2 i j n 1 2 j i n i, j, où i, j 1,..., n, avec i j. (b) Un n cycle dans S n est appelé permutation circulaire. (a) Le nombre de k cycles dans S n est n n 1 n k 1 n! k k n k! k 1!Cn. k En particulier, dans S n, il y a Cn 2 n n 1 2 transpositions et n 1! permutations circulaires. (b) Le groupe S 1 est composé de l identité : S 1 Id. (c) Le groupe S 2 Id, 1, 2 : il est commutatif, cyclique et isomorphe à 2. (d) Le groupe S 3 est composé de l identité, trois transpositions 1, 2, 2, 3 et 1, 3, et deux permutations circulaires 1, 2, 3 et 1, 3, 2. (e) Le groupe S 4 contient 24 4! éléments : à part l identité, il y a 6 transpositions, 6 permutations circulaires, 8 3 cycles, et 6 autres éléments qui ne sont pas des cycles.
3 CHAPITRE II. GROUPE SYMÉTRIQUE 14 Définition. Deux cycles i 1,..., i k et j 1,..., j l de S n sont dits disjoints si (a) Dans S 6, les cycles 1, 3 et 2, 4, 5 sont disjoints. i 1,..., i k j 1,..., j l. (b) Dans S 7, les cycles 2, 6, 8, 5 et 4, 5 ne sont pas disjoints. Théorème 16 (Propriétés du groupe symétrique). Dans le groupe S n : (a) Deux cycles disjoints commutent. (b) Toute permutation est produit de cycles deux à deux disjoints : α 1 α r. Cette décomposition est unique à ordre près. (c) L ordre de la permutation α 1 α r décomposée en produit de cycles deux à deux disjoints est égal au ppcm des longueurs des α i. (d) Toute permutation est produit de transpositions. Démonstration. (a) Soient α i 1,..., i k et β j 1,..., j l deux cycles disjoints. On va montrer que pour tout m 1,..., n, β α m α β m. On distingue trois possibilités : (i) m i 1,..., i k. Alors α m i 1,..., i k, donc m j 1,..., j l et α m j 1,..., j l. Donc β α m α m α β m. (ii) m j 1,..., j l. En échangeant les rôles de α et β, on se ramène au premier cas. (iii) m i 1,..., i k, j 1,..., j l. Alors α m m et β m m, donc β α m m α β m. (b) Soit Id. Il existe i 1 1,..., n tel que i 1 i 1. Pour j 2, on pose i j i j 1. Soit k 2 le plus petit entier tel que i k 1 i k i 1, i 2,..., i k. On doit avoir i k i 1, car sinon i k i j, où 2 j k, mais alors on aurait i k i j 1 i j et i j 1 i k, ce qui contredit l injectivité de. On obtient alors un cycle α 1 i 1,..., i k de longueur k. Le restriction de à 1,..., n i 1,..., i k est une permutation. Par récurrence sur n, on peut écrire cette restriction comme le produit de cycles deux à deux disjoints α 2 α r. Ces cycles sont aussi deux à deux disjoints avec α 1. (c) Soient Id et α 1 α r sa décomposition en cycles disjoints. Pour tout entier k, on a k α k 1 α k r car les cycles commutent. Puisque les cycles α i sont deux à deux disjoints, on a k Id si et seulement si α k 1 Id, α k 2 Id,..., et α k r Id. Si est d ordre m, on a que o β i m pour tout i 1,..., r, et donc le ppcm des o α i divise m. Réciproquement, si s est le ppcm des o α i, on a que s α s 1 α s r Id, donc m divise s, d où m s. (d) D après le (b), il suffit de démontrer le résultat pour les cycles. Or, on voit que : i 1,..., i k i 1, i k i 1, i k 1 i 1, i 2. (1) Remarque. L écriture d une permutation en produit de transpositions n est pas unique : par exemple, 1, 2, 3 1, 3 1, 2 1, 2 2, 3 2, 3 1, 3. De plus, si n 3, et i, j 2,..., n, i j, alors on peut toujours remplacer la transposition i, j par le produit 1, i 1, j 1, i.
4 CHAPITRE II. GROUPE SYMÉTRIQUE 15 3 Signature d une permutation Si le nombre de transpositions dans la décomposition d une permutation est variable, en revanche la parité de ce nombre est invariante. Soit α 1 α r S n une permutation décomposée en produit de cycles deux à deux disjoints. Nous regardons ce qui se passe lorsqu on multiplie par une transposition i, j, avec i j. Il y a deux cas possibles : (i) i et j apparaissent au même cycle α s i 1 i,..., i l j,..., i k. Alors produit de k i, j i, j α 1 α r α 1 α s 1 i, j α s α r α 1 α s 1 i, j i,..., j,..., i k α r α 1 α s 1 i, i 2,..., i l 1 j, i l 1,..., i k α r. produit de l 2 transpositions produit de k l transpositions (ii) i et j apparaissent dans des cycles différents α s i i 1,..., i k et α t j j 1,..., j l. Alors produit de k produit de l i, j i, j α 1 α r i, j α s α t 1 m r m s,t α m i, i 2,..., i k, j, j 2,..., j l produit de k l 1 m m s,t r α m. Dans les deux cas, la forme finale est un produit de cycles disjoints. En écrivant chacun des cycles comme produit de transpositions, on voit qu entre et i, j, le nombre de transpositions décroît de 1 dans le premier cas, et augmente de 1 dans le second cas. Donc multiplication par une transposition change la parité du nombre de transpositions. En particulier, on ne pourra pas écrire une transposition à la fois comme produit d un nombre pair et impair de transpositions. Ceci justifie la définition suivante : Définitions. Une permutation S n est dite paire (resp. impaire) lorsqu elle s écrit comme produit d un nombre pair (resp. impair) de transpositions. L application ε : S n 1, 1 qui à une permutation associe sa parité s appelle signature de la permutation (si est paire, ε 1, si est impaire, ε 1). La signature de est parfois notée ε ou sgn. Théorème 17. (a) La signature d un k cycle est égale à 1 k 1. (b) La signature ε : S n 1, 1, est un morphisme de groupes, surjectif si n 2. Démonstration. (a) Suit directement de l équation (1). (b) Si l on a deux permutations, S n, on compare la signature de, et dans les quatre cas possibles ( paire ou impaire ; et paire ou impaire). Si n 2, alors Id, 1, 2 S n, et ε Id 1, ε 1, 2 1, donc Im 1, 1. (a) L identité est une permutation paire ; une transposition est une permutation impaire ; un k cycle est une permutation paire si et seulement si k est impair. (b) Pour toute permutation S n, 1 ε 1 ε ε 1, donc comme ε prend ses valeurs dans 1, 1, on a ε ε 1.
5 CHAPITRE II. GROUPE SYMÉTRIQUE 16 (c) Dans S 6, si , 6 2, 5, 3, ε ε 1, 6 ε 2, 5, Remarque. Voici une deuxième définition de la signautre d une permutation. Soit une permutation de S n. Puisque est une bijection, si 1 i j n, on aura ou bien i j ou j i. Dans le second cas, on dit que i et j présentent une inversion pour. Soit ι le nombre total d inversions pour présentées par les éléments de 1,..., n. Le nombre ε 1 ι est appelé signature de. On peut montrer que cette définition coïncide avec la définition précédente de signature. Exemple. Soit , 6 2, 5, 3 dans S 6. L élément 1 présente une inversion avec 2, 3, 4, 5, 6. L élément 2 présente une inversion avec 3, 4, 5, 6. L élément 3 présente une inversion avec 6. L élément 4 présente une inversion avec 5 et 6. L élément 5 présente une inversion avec 6. Le nombre total d inversions est ι 13, est impaire. Définitions. Soit n 2. Soit A n Ker ε le sous-groupe de S n de permutations paires. A n s appelle le groupe alterné. Il est d indice 2 dans S n (les deux classes modulo A n sont A n qui est l ensemble des permutations paires, et 1, 2 A n, qui est l ensemble des permutations impaires). Par le Théorème de Lagrange (Théorème 11), on a A n S n 2 n! 2. 4 Le théorème de Cayley Le théorème suivant permet de représenter tout groupe fini comme un sous-groupe d un groupe symétrique. Théorème 18 (de Cayley (1878)). Tout groupe fini d ordre n est isomorphe à un sous-groupe du groupe symétrique S n. g : G G Démonstration. Soient G un groupe fini d ordre n, et g G. Alors l application est une x gx bijection d application inverse 1 g g 1 (en effet, pour tout x G, g g 1 x g g 1 x gg 1 x x, et de la même manière, g 1 g x x). Il suit que g est une permutation de G, et numérotant les n éléments de G par 1, 2,..., n, c est un élément de S n. : G S n L application est un morphisme de groupes injectif. En effet, pour tout g, h G et tout g g x G, on a gh x g hx g h x, donc gh g h. Ensuite, est injectif, car si g Ker, alors g Id G, donc g x gx x pour tout x G, en particulier ge e, d où g e. Ainsi, G est isomorphe à G qui est un sous-groupe de S n par la Proposition 8(d). Remarque. Soit n. Puisque S n n a qu un nombre fini de sous-groupes, il isomorphisme près, il n y a qu un nombre fini de groupes d ordre n.
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